Ces dernières semaines, les rapports internationaux sur le climat et la mobilisation citoyenne se sont accrus comme jamais pour pousser les politiques à agir.

L’impulsion politique est essentielle mais elle ne fera pas tout. Les entreprises – quelles que soient leur taille bien que les plus grosses aient par nature plus de pouvoir d’action – ont-elles aussi une responsabilité historique : celle de transformer leur mission et leur modèle économique pour contribuer à relever les défis sociétaux et environnementaux.

Le temps presse mais les conditions n’ont jamais été aussi favorables.

L’opinion publique est prête et ne demande qu’à voir des entreprises endosser cette extension de responsabilité. Les salariés ont eux aussi soif de sens et envie d’apporter leur contribution au bien commun en donnant à leur engagement un supplément d’âme dont le manque est chaque jour plus fort. Le cadre législatif enfin, avec le vote prochain du statut d’entreprise à mission, ouvre une opportunité exceptionnelle pour faire cette mutation : passer d’un modèle d’entreprise essentiellement tourné vers le profit à un modèle plus raisonné où la raison d’être sociétale d’une entreprise sera placée au même niveau que sa raison d’être économique.

Pas d’entreprise à mission sans leader éclairé

Notre monde a tellement changé en deux décennies… L’ampleur des changements et leur complexité dépassent ce que tout tête pensante, même bien construite, peux aujourd’hui appréhender. J’ai aujourd’hui 46 ans, un passé d’entrepreneur réussi et pourtant, force est de constater que je dois sans cesse déconstruire ces certitudes et ces croyances que je croyais avoir validées sur le business et la façon dont on embarque des équipes…

Dans un monde où tous les repères ont volé en éclat, peut-on raisonnablement penser que le leadership d’entreprise puisse faire l’économie d’une profonde remise en question ?

En attestent tous les travaux récents sur le sujet et les leaders pionniers, nous n’avons pas ici simplement affaire à une évolution de posture ou de discours que les dirigeants et managers seraient sommés de faire. Il s’agit d’un véritable saut de conscience, d’une rupture dans la façon de penser et de guider les organisations de demain. « Aucun problème ne peut être résolu au même niveau de conscience que celui qui l’a engendré » nous rappelle Einstein dans sa célèbre devise.

En d’autres termes, les décideurs peuvent aujourd’hui être l’accélérateur de la transformation de leur entreprise ou, au contraire, s’ils ne font pas leur « job personnel de remise en cause» être le plus grand frein à celle-ci.

Il faudra une volonté et une énergie considérables pour arriver à réorienter la puissance des entreprises vers le bien commun. Car nous sommes pétris de croyances sur la performance, sur le rôle du management, sur le comportements des salariés… Nous sommes surtout imbibés d’une impuissance inconsciente qui souvent nous fait penser que c’est impossible, que les actionnaires s’y opposeront ou qu’on ne pourra pas survivre dans une concurrence si impitoyable.

L’heure est donc venue d’une génération de nouveaux leaders éclairés car conscients des enjeux, inspirants car prêts à dédier leur vie à les relever.

Des leaders qui savent se remettre en cause avec honnêteté pour regarder les limites du logiciel intime qu’ils ont jusqu’ici utilisé pour réussir et développer leur entreprise. L’heure est à des leaders qui réapprennent à rêver leur propre vie pour nourrir ensemble le rêve de leur entreprise. Elle est à celle et ceux qui ont envie de changer de monde tout en s’épanouissant en tant que personne car il est désormais nécessaire de mobiliser toutes nos intelligences : rationnelle, émotionnelle (celle du cœur) et spirituelle (celle qui donne un sens à notre vie).

Notre époque est incertaine et douloureuse mais également extraordinaire : pour celui qui a la foi et le goût de l’aventure, tout est à réinventer. Tout peut devenir possible.

« On commence à balayer les escaliers par le haut » me disait un de mes amis chef d’entreprise. C’est au top management que revient la responsabilité de la bascule des consciences en montrant la voie de sa propre transformation.

Quel plus belle responsabilité pourrait-on imaginer ?

@Romain CRISTOFINI – octobre 2018