Leaders : déconditionnez-vous de Maslow !

Des niveaux de besoin aux niveaux de conscience

 

Qu’on l’utilise en marketing ou en management, tout le monde connaît la célèbre pyramide des besoins d’Abraham Maslow.

Elle date des années 40 et a subi de nombreuses critiques (dont celle d’une validation scientifique insuffisante) mais elle reste malgré cela profondément ancrée dans nos esprits (et dans les formations managériales) : nous aurions 5 niveaux de besoins (besoins physiologiques, de sécurité, d’appartenance et d’amour, d’estime et d’accomplissement de soi) et ces besoins seraient, selon Maslow, hiérarchisés.

Parmi les critiques faites à ce modèle, deux sont particulièrement marquantes :

  • La hiérarchisation des besoins n’a jamais été prouvée. C’est Maslow lui-même qui les a représentés en séquence verticale sans que ses travaux ne valident cet ordonnancement. La forme de la pyramide laisse à penser que les besoins de base sont plus importants que les besoins plus élevés (vision clairement matérialiste de l’être humain à l’image des États-Unis consuméristes d’avant-guerre).
  • Tous les besoins ne s’expriment-ils simultanément ? La pyramide induit un raisonnement simpliste, amenant à penser inconsciemment qu’on ne peut atteindre un étage plus élevé qu’en ayant satisfait à 100% les besoins du palier précédent. Un peu comme si un manager ne s’autorisait à écouter son besoin de connaissance de soi et de sens que lorsqu’il a atteint un salaire et un poste suffisamment élevés…

A l’heure où le leadership en entreprise est critiqué et appelé à se renouveler, n’est-il pas temps de se libérer de ce modèle daté et du conditionnement qu’il a induit ?

Ce conditionnement est d’autant plus grave qu’il pèse lourdement chez les leaders, qu’ils soient managers de grands groupes ou patrons de PME: ceux-ci se consacrent encore trop peu à investir dans leur réalisation personnelle. Coincé tout en haut de la pyramide, le besoin d’accomplissement apparaît comme une sorte de « cerise sur le gâteau » qui ne serait finalement pas accessible au commun des mortels (ou alors uniquement en deuxième partie ou fin de carrière). Cette absence d’investissement sur sa propre croissance en tant qu’homme ou femme se constate concrètement : les « patrons » sont souvent les derniers à aller assister aux formations (qu’ils demandent à leurs équipes de suivre) et ils sont encore plus rares à avoir entamé un travail personnel en coaching ou en thérapie.

Des besoins aux niveaux de conscience

Plus que jamais pourtant, la capacité d’une entreprise à évoluer dans un 21ème siècle incertain, semble liée au niveau de conscience de ses dirigeants.

Parmi les modèles qui ont suivi les recherches de Maslow, le modèle développé par Richard Barrett depuis la fin des années 90, offre une grille de lecture applicable aussi bien aux organisations qu’aux leaders et semble rencontrer un certain succès (il a été utilisé dans plus de 6.000 organisations et par 3.000 dirigeants dans 90 pays).

Les deux derniers niveaux de conscience frappent par leur modernité et leur rupture avec le modèle dominant (compétitif et privilégiant la performance économique) :

le niveau 6 baptisé « faire la différence » invite l’organisation et le leader à penser de manière holistique et systémique en se concevant comme faisant partie d’un environnement plus vaste au sein duquel ils peut nouer des relations positives au bénéfice de chacune des parties prenantes.

le niveau 7 baptisé « service » va encore au-delà en invitant leaders et organisations à repenser en profondeur leur rôle pour la société, la planète et les générations futures. De hautes valeurs morales et altruistes sont alors en action et sous-tendent toute la stratégie et l’action de l’entreprise.

barrett

Comme tout modèle, celui de Barrett peut être critiqué mais il a le mérite de jalonner très concrètement les voies possibles pour le leader qui souhaite se remettre en cause et placer sa croissance personnelle au service de celle de son organisation.

Alors, prenons-nous à rêver. A faire comme ces décideurs de plus en plus nombreux qui inversent la pyramide en considérant qu’en s’autorisant un fort désir de réalisation personnelle, ils trouveront une source de sens, d’innovation et d’énergie inépuisables qui rejaillira sur leurs équipes et leur entreprise. Les jeunes entrepreneurs sociaux, branchés sur leur désir d’accomplissement en voulant résoudre les problèmes de la société, ne nous montrent-ils par la voie eux-aussi ? Le sens d’une mission, la raison d’être d’une entreprise viennent du cœur et de l’âme, ce “higher purpose” ne se trouve pas dans les livres ou les modèles : ils se trouvent à l’intérieur de chacun et de chaque leader. A condition qu’il décide désormais que se mettre à l’écoute de soi n’est plus la cerise, mais le gâteau.

Revenir aux inspirations